Écoutez le segment complet du balado sur Mon Carnet par Bruno Guglielminetti (1:20:28)
Émilie Delvoye, directrice des communications chez Prompt, s’entretient avec Mathieu Lachaîne, chef de la direction chez Sentiom, une entreprise axée sur la transformation numérique des milieux de vie, notamment pour les aînés et les personnes avec incapacité.
Ils vous présentent une solution conçue pour protéger les occupants des résidences.
Découvrez les passages clés de l’entrevue
Peux-tu nous parler de la solution que vous avez développée pour protéger les occupants des résidences?
Il s’agit d’un environnement intelligent composé d’objets connectés, équipés de capteurs non intrusifs — c’est-à-dire sans caméra ni micro — afin de préserver la vie privée des personnes. Ces objets recueillent des données qui sont ensuite analysées par une intelligence artificielle. L’objectif est de détecter des anomalies ou des écarts par rapport aux habitudes de vie, ce qui peut indiquer un besoin en matière de sûreté. Par exemple : la personne s’est-elle levée ce matin? A-t-elle fait une chute? A-t-elle besoin d’aide aux toilettes ou dans la salle de bain? L’objectif est donc de prédire et de réduire les besoins en soins, en intervenant uniquement lorsque cela est nécessaire.
Alors, justement, quel est le besoin en lien avec cette innovation?
Notre société est en pleine transformation démographique : le nombre de personnes en perte d’autonomie augmente d’environ 5 % par année. C’est un enjeu majeur de société. Parallèlement, nous faisons face à une pénurie de main-d’œuvre dans le secteur des soins. Ces deux réalités créent une « tempête parfaite » à laquelle nous avons voulu nous attaquer. Notre entreprise a une mission sociale et environnementale. Actuellement, les CLSC fournissent des soins à domicile. Par exemple, lorsqu’une personne présente un risque pour sa sécurité — comme allumer un four et oublier de l’éteindre — on déconnecte l’appareil pour prévenir les accidents. Cela oblige ensuite les services à livrer des repas quotidiennement, ce qui mobilise beaucoup de ressources.
Mais au-delà de l’aspect logistique, cette approche a des effets négatifs sur la personne : elle perd en autonomie cognitive (car elle n’a plus à gérer ses repas), en autonomie sociale (elle ne sort plus faire l’épicerie), et cela accélère son déclin global. Notre objectif, avec la technologie, est donc de soutenir les besoins de manière ciblée, en intervenant uniquement lorsque c’est nécessaire, plutôt que de façon permanente.
Cette innovation est née d’un croisement entre mon parcours en cybersécurité et une expérience personnelle. Il y a plus de dix ans, j’ai vendu mes entreprises, dont l’une développait une technologie capable de gérer des milliers d’événements simultanés et de détecter des anomalies — un outil conçu pour la cybersécurité. En parallèle, ma famille possédait des blocs appartements. L’idée est venue naturellement : pourquoi ne pas appliquer cette technologie à l’environnement résidentiel pour améliorer la sûreté des personnes? Rapidement, nous avons rencontré des acteurs de l’écosystème, des centres de recherche, et l’idée a pris forme.
Comme beaucoup, j’ai des proches vieillissants. Nous sommes une entreprise familiale, et mon père, âgé de 74 ans, est toujours impliqué. Nous avons vu une réelle opportunité d’utiliser les données de l’environnement pour mieux accompagner les personnes en perte d’autonomie, tout en respectant leur dignité et leur indépendance.
Est-ce qu’il y a une continuité à travers tous ces projets successifs qui ont mené à ce projet en particulier ou à cette innovation?
Tout à fait. Lorsqu’on poursuit un objectif ambitieux, il faut savoir le décomposer en blocs — comme des blocs Lego. Chacun de ces blocs représente un projet innovant à part entière, avec son propre écosystème de partenaires engagés dans l’atteinte des objectifs, tant sur le plan de la livraison que de la viabilité. L’approche entrepreneuriale consiste à structurer chaque projet de manière à ce qu’il puisse, idéalement, fonctionner de façon autonome, y compris sur le plan financier. On dit souvent qu’il faut dix ans pour devenir un succès du jour au lendemain — c’est pourquoi chaque bloc doit pouvoir générer de la valeur en cours de route.
Pour que l’innovation prenne vie, il faut réunir plusieurs acteurs : des centres de recherche et des universités pour la recherche fondamentale, des startups et PME pour l’agilité et la créativité, et de grandes entreprises qui peuvent faciliter l’accès au marché grâce à leur base de clients. De notre côté, nous privilégions des projets ancrés dans des milieux de vie réels, souvent en collaboration avec des OBNL. Comme nous recevons des fonds publics, il nous tient à cœur de les réinvestir dans des initiatives qui soutiennent concrètement la communauté. On peut faire émerger beaucoup d’idées dans un hackathon de 48 ou 72 heures — et plusieurs de nos projets pourraient en être issus. Mais le vrai défi, c’est l’opérationnalisation. C’est là que tout se joue : transformer une bonne idée en solution concrète, durable et intégrée dans le quotidien. Et pour y arriver, il faut que tout l’écosystème travaille ensemble, avec une PME bien positionnée au cœur de l’action.
[…] Si vous souhaitez développer un projet d’innovation technologique en partenariat, sachez que Prompt offre du financement et vous met en relation aussi avec des entreprises. Les entreprises et les expertises que vous recherchez, on a plusieurs programmes qui sont disponibles en continu ou bien sur appel à projet.